Les hommes ont mille façons de déclarer leur flamme. Le prince Sadruggin Aga Khan, lui, avait choisi d’exprimer ses sentiments en offrant à sa dulcinée des boites précieuses. Durant les trente ans que dura son mariage avec Catherine, il acheta, commanda, collectionna les plus belles, les plus raffinées, les plus richement ornées pour son épouse. « Souvent, un mot doux était gravé à l’intérieur, précise Nicolas Luchsinger, directeur retail international Van Cleef & Arpels et co-commissaire de l’exposition consacrée à ces objets plus que précieux.
La première, avait été créée par Cartier avant la Grande Guerre, une somptuosité d’un raffinement exquis. Au fil des ans, il y en eu plus de cent cinquante dont un tiers est aujourd’hui exposé dans les salons de l’Ecole des arts joailliers. Rectangulaires, cylindriques, striées d’or ou de délicats bouquets de diamants roses, parées de jade et de lapis lazulis, ces boites sont des trésors d’ingéniosité, de sophistication, qui racontent une époque d’un luxe inouï. « Dans ce genre d’exercice, un joaillier peut exprimer son talent avec une grande liberté, souligne Nicolas Nicolas Luchsinger. Bien davantage que sur une bague, où la technique impose des contraintes ».
Que de merveilles… Voici un boîte signée Lacloche présentant des pivoines en rubis et saphirs sur une treille de diamants blancs, une panthère d’émail noire prenant ses aises sur un fume-cigarettes représentant un ciel de nacre rose, une mosquée de lapis-lazuli sur un paysage de montagne… L’inspiration vient de Chine, du Japon, d’Orient, d’Europe où se déploie alors les formes géométriques de l’Art Déco. Autant de symboles d’un temps évanoui où les femmes laissaient pendre au bout d’une grosse bague une minuscule boite précieuse contenant un soupçon de rouge à lèvres et un nuage de poudre…Le strict nécessaire.
Mylène Sultan
Mode d’emploi des nécessaires précieux par Gislain Aucremane, historien d’art, professeur à l’Ecole des arts joailliers, Paris.
Délicats poudrier et bâton de rouge à lèvres assorti, en émail rouge et noir, entrecoupés de liserés de diamants. Lacloche Frères, Paris, vers 1928
La majestueuse panthère noire se déplace dans un paysage verdoyant de jungle ornée d’arbres aux fruits de paradis. Nacre, rubis cabochon, cabochon de turquoise, onyx, diamants… A l’intérieur, se cachent l’indispensable étui à rouge à lèvres, le poudrier et un minuscule flacon de parfum. Cartier, Paris, 1925.
Ce Nécessaire Chrysanthème, décorée de fleurs en rubis, améthystes et saphirs et de feuilles en émeraude sur un treillis de diamants cache un minuscule compartiment avec miroir intégré, porte-rouge à lèvres et poudriers ! Lacloche Frères, Paris, vers 1928.
Cette boîte en lapis-lazuli aux coins arrondis, ornée en son centre de diamants, est flanquée de deux segments triangulaires en cristal de roche dépoli. Van Cleef & Arples, fabrication Strauss, Allard & Meyer, Paris 1928.
Eblouissant nécessaire en forme d’enveloppe avec un motif d’émail bleu flanqué de bandes d’émail rouge, orné de trois saphirs de taille cabochon. Strauss, Allard & Meyer, Paris, vers 1925
Cette boîte ronde parfaite s’inspire de l’art chinois du penjing et de l’art japonais du bonsaï. Orné de symboles (corps célestes, étoiles, motifs sacrés de bon augure…), le délicat couvercle cache … un poudrier. Cartier, fabrication Auguste Peyroula, Paris, vers 1928.
Objets précieux Art Déco, une collection du prince et de la princesse Sadruddin Aga Khan.
Exposition du 4 au 25 avril 2018, Ecole des arts joailliers, 31 rue Danièle Casanova, Paris IIe.
A lire : Jeweled Splendours of the art Deco Era, the Prince and Princess Sadruddin Agan Khan Collection, Thames & Hudson 2018.